ĂPIDĂMIOLOGIE
La neurofibromatose 1 (NF1) ou maladie de Von Recklinghausen est une maladie gĂ©nĂ©tique frĂ©quente (1 cas/3000 Ă 3500 naissances). En France, la NF1 concerne ainsi environ 20000 personnes, aussi bien des hommes que des femmes. Les formes sĂ©vĂšres ne reprĂ©sentent que 15% des cas. La pĂ©nĂ©trance est complĂšte dĂšs lâenfance (autour de 8 ans) mais pour une mĂȘme mutation et une mĂȘme famille, lâexpressivitĂ© est variable. Le diagnostic peut ĂȘtre difficile et tardif chez les jeunes enfants et dans les formes frustres.
Bien que les lĂ©sions dermatologiques soient souvent au premier plan, la NF1 peut toucher de multiples organes, le diagnostic est avant tout clinique. Elle est associĂ©e Ă un risque accru de cancers et une diminution de lâespĂ©rance de vie dâenviron 10 ans.
PHYSIOPATHOLOGIE
La neurofibromatose 1 est une maladie autosomique dominante. Le gÚne NF1, situé sur le chromosome 17, code la neurofibromine, impliquée dans le contrÎle de la prolifération des cellules. Chez les personnes atteintes, la production de neurofibromine est donc altérée, favorisant le développement de tumeurs, le plus souvent bénignes. La maladie est familiale dans 50% des cas, sporadique dans les autres cas.
PRINCIPALES MANIFESTATIONS CLINIQUES ET BIOLOGIQUES
La NF1 est une maladie Ă expressivitĂ© variable et de nombreuses prĂ©sentations cliniques sont possibles. Les diverses manifestations et complications varient selon lâĂąge du patient et doivent ĂȘtre recherchĂ©es rĂ©guliĂšrement :
Les signes les plus frĂ©quents sont cutanĂ©s. Les taches cafĂ© au lait sont des taches pigmentĂ©es brun clair, de quelques millimĂštres Ă quelques centimĂštres de diamĂštre, qui peuvent apparaitre dĂšs les premiĂšres semaines de la vie. Les lentigines sont des taches cafĂ© au lait millimĂ©triques, ressemblant Ă des taches de rousseur : elles sont localisĂ©es dans le pli de l’aine et dans le creux axillaire et parfois sur le reste du corps (cou, torses, Ă©paulesâŠ). Les neurofibromes apparaissent plus tardivement, soit sous la forme de petites excroissances de la peau (neurofibromes cutanĂ©s), gĂ©nĂ©ralement indolores mais parfois inesthĂ©tiques, soit sous forme de nodules palpables sous la peau (neurofibromes sous-cutanĂ©s), qui peuvent quelquefois ĂȘtre douloureux. Les neurofibromes plexiformes sont plus rares et tendent Ă se dĂ©velopper Ă partir de l’adolescence. Ce sont des zones infiltrĂ©es, mal limitĂ©es contenant parfois des petits nodules fibreux en leur sein; la peau en regard est Ă©paisse et pigmentĂ©e. Ils peuvent s’Ă©tendre progressivement, et parfois ĂȘtre compressifs, gĂ©nĂ©rant des douleurs rĂ©currentes neuropathiques et/ou des symptĂŽmes neurologiques.
Les neurofibromes nodulaires internes et plexiformes (phĂ©notype Ă risque) doivent ĂȘtre surveillĂ©s rĂ©guliĂšrement car ils peuvent dĂ©gĂ©nĂ©rer en neurofibrosarcome, surtout Ă lâĂąge adulte (3-4% des cas).
Les nodules de Lisch sont des petites taches pigmentĂ©es sur l’iris qui n’ont aucun retentissement sur la vision mais sont trĂšs Ă©vocateurs de NF1 et peuvent constituer une aide au diagnostic. En revanche, une diminution du champ de vision, l’apparition d’un strabisme ou une baisse de la vue doivent faire rechercher un gliome des voies optiques. Le gliome des voies optiques concerne environ 15% des personnes atteintes de NF1 ; il apparait gĂ©nĂ©ralement avant l’Ăąge de 6 ans. Le plus souvent, il Ă©volue lentement et reste asymptomatique, quelquefois, il peut ĂȘtre agressif et compromettre le pronostic visuel.
Des difficultĂ©s d’apprentissage sont prĂ©sentes chez 40% des patients : troubles de la concentration, troubles dâĂ©locution, troubles de la mĂ©moire, dâorganisation, troubles visio-spatiaux, dĂ©ficit attentionnel, parfois une agitation, des difficultĂ©s scolaires. Ces troubles doivent ĂȘtre dĂ©pistĂ©s dans lâenfance pour une prise charge optimale et prĂ©coce. Il n’y a classiquement pas de retard mental chez les enfants atteints de NF1.
Des complications orthopĂ©diques peuvent Ă©galement survenir. Une inĂ©galitĂ© de la longueur des membres infĂ©rieurs, une pseudarthrose, des dĂ©formations osseuses peuvent tĂ©moigner de la prĂ©sence de neurofibromes osseux. L’apparition d’une scoliose (10-28%) Ă lâadolescence constitue aussi une complication non rare de la NF1, souvent associĂ©e aux dysplasies vertĂ©brales.
MOYENS DIAGNOSTIQUES
Le diagnostic de NF1 est clinique et repose sur les critÚres du NIH (National Institutes of Health) : 2 critÚres sont nécessaires pour poser le diagnostic :
℠6 taches café-au-lait > 5mm dans leur plus grand diamÚtre chez les enfants ou > 15mm chez les adultes.
â„ 2 neurofibromes quel que soit le type ou â„1 neurofibrome plexiforme. Lentigines axillaires ou inguinales.
1 gliome des voies optiques .
â„ 2 nodules de Lisch.
â„1 lĂ©sion osseuse caractĂ©ristique (dysplasie sphĂ©noĂŻde, amincissement de la corticale des os longs avec ou sans pseudarthroseâŠ).
â„1 parent du 1er degrĂ© atteint de NF1 selon les critĂšres prĂ©cĂ©dents.
L’Ă©tude gĂ©nĂ©tique n’est habituellement pas rĂ©alisĂ©e, car elle ne permet pas de prĂ©dire la gravitĂ© de la maladie et ne modifie pas la prise en charge. Elle est rĂ©alisĂ©e dans de rares cas Ă prĂ©sentation clinique incomplĂšte et dans le cadre dâun projet parental permettant de rĂ©aliser un diagnostic antĂ©natal ou prĂ©implantatoire. Environ 95% des mutations du gĂšne NF1 peuvent actuellement ĂȘtre identifiĂ©es…
PRINCIPES DU TRAITEMENT
Il n’existe pas de traitement curatif. En lâabsence de complication, la surveillance clinique doit ĂȘtre rĂ©alisĂ©e par un spĂ©cialiste de la NF1 annuellement pour les enfants et pour les adultes avec un phĂ©notype Ă risque ou tous les 2 Ă 3 ans pour les adultes sans phĂ©notype Ă risque ni complication. Les autres consultations pourront ĂȘtre eïŹectuĂ©es par le mĂ©decin traitant, le dermatologue ou le pĂ©diatre. Cette surveillance repose sur un examen clinique dermatologique et orthopĂ©dique, et sur un bilan ophtalmologique complet avec Ă©valuation du champ visuel. Si cet examen n’est pas rĂ©alisable dans de bonnes conditions (enfants), la surveillance pourrait ĂȘtre assurĂ©e par IRM.
L’apparition d’un gliome des voies optiques impose d’intensifier la surveillance. Le plus souvent, la tumeur est stable ou trĂšs lentement progressive; lâabstention thĂ©rapeutique est proposĂ©e avec surveillance. Si le gliome est agressif, il nĂ©cessite un traitement spĂ©cifique (chimiothĂ©rapie, plus rarement chirurgie, radiothĂ©rapie).
Un bilan neuropsychologique cerne les difficultĂ©s dâapprentissage Ă©ventuelles. Leur prise en charge doit ĂȘtre prĂ©coce : orthophonie, psychomotricitĂ©, ergothĂ©rapie.
Les neurofibromes cutanĂ©s peuvent ĂȘtre enlevĂ©s par chirurgie ou par Ă©lectrocoagulation au laser CO2, en particulier si leur retentissement esthĂ©tique est important. Les neurofibromes plexiformes peuvent ĂȘtre enlevĂ©s chirurgicalement s’ils sont trop gĂȘnants mais leur ablation est souvent complexe avec parfois une rĂ©cidive.
Les neurofibromes internes doivent ĂȘtre recherchĂ©s en cas de douleurs, de signes de compression, de syndrome dĂ©ficitaire, par imagerie (IRM) et TEP en cas de suspicion clinique de transformation en tumeur maligne des gaines nerveuses pĂ©riphĂ©riques (TMGNP), qui surviennent principalement chez les adultes entre 20 et 30 ans. Leur traitement associe une exĂ©rĂšse chirurgicale +/- une radiothĂ©rapie adjuvante. Une chimiothĂ©rapie nĂ©oadjuvante se discute si la tumeur est inopĂ©rable ou mĂ©tastatique, avant une reprise chirurgicale et une possible radiothĂ©rapie.
Les scolioses qui peuvent survenir au cours de la NF1 sont souvent peu Ă©volutives ; leur prise en charge repose gĂ©nĂ©ralement sur la kinĂ©sithĂ©rapie, plus rarement sur le port d’un corset voire sur une intervention chirurgicale.
La prise en charge thĂ©rapeutique de la douleur fait appel aux antalgiques de diïŹĂ©rents paliers aprĂšs Ă©valuation de la douleur nociceptive et aux antidĂ©presseurs ou antiĂ©pileptiques dans les douleurs neuropathiques. Des thĂ©rapies non mĂ©dicamenteuses peuvent ĂȘtre proposĂ©es en complĂ©ment (kinĂ©sithĂ©rapie, ergothĂ©rapie, rĂ©adaptation fonctionnelle). L’intĂ©rĂȘt d’une prise en charge psychologique doit ĂȘtre Ă©valuĂ© au cas par cas.
CENTRES DE PRISE EN CHARGE
â Centres de rĂ©fĂ©rence des maladies rares de la peau et des muqueuses dâorigine gĂ©nĂ©tique â Sud
â Centre de rĂ©fĂ©rence des neurofibromatoses
â Centre de compĂ©tence des neurofibromatoses
ASSOCIATIONS PARTENAIRES
â Association Neurofibromatoses et Recklinghausen (ANR)
â Ligue Française contre la Neurofibromatose (LFCN)
POUR ALLER PLUS LOIN
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ARTICLE Ă LA UNE
â QualitĂ© de vie des patients atteints de neurofibromes cutanĂ©s